Utiliser son télescope en ville

Les lumières de la ville sont un frein à de potentielles belles observations. Mais les rendent-elles pour autant impossibles ? Il est avéré qu’un ciel sombre, sans pollution lumineuse, et donc en campagne, permettra à votre télescope d’être dans les meilleures conditions et d’exploiter ainsi sa pleine puissance potentielle.

Mais certains d’entre nous habitent en ville et n’avons pas systématiquement la possibilité de nous déplacer pour profiter des meilleurs ciels. Alors quelles solutions s’offrent à nous pour braver les contraintes des ciels urbains ?

Faisons le tour ensemble des caractéristiques de la pollution lumineuse. Regardons comment s’adapter face à cette dernière, quelles observations sont possibles mais aussi quelles solutions s’offrent à nous !

La pollution lumineuse

La pollution du ciel nocturne, c’est tout simplement l’impact des lumières artificielles (de la ville souvent) qui vont venir perturber la visibilité (voire faire disparaître) des objets de la voûte céleste.

Les villes ont donc des halos lumineux qui viennent polluer les observations. Les appareils sont particulièrement sensibles à ces lumières parasites lorsque le grossissement est faible.

Plus on va chercher à grossir, plus on va se focaliser sur une petite zone dans le ciel et moins on sera sensible à la pollution lumineuse.

La pollution lumineuse bride les télescopes. En effet, avec une magnitude de 4 en ville, un télescope de 250 mm de diamètre égalera en luminosité captée celle d’un télescope de 100 mm de diamètre dans un ciel plus sombre de campagne à 6 de magnitude.

A matériel égale, on comprend donc que ce dernier sera bien mieux exploité dans sa pleine mesure en campagne. Alors faut-il investir dans un grand télescope ? Pas forcément car ce dernier sera alors impossible ou très compliqué à transporter. Et vous aurez vite l’envie de tester votre télescope dans un ciel plus sombre et donc de le transporter, que ce soit lors de séances d’observation le week-end, voire même pendant vos vacances !

Adapter ses observations à la ville

Ainsi, quand on observe depuis une (grande) ville, on ferme par définition certaines portes et notamment dans le ciel profond où non seulement la captation de lumière est importante et où l’on cherchera à observer des zones plutôt larges. Oubliez les nébuleuses étendues et autres galaxies lointaines. En observant en ville, vous êtes “condamnés” à vous focaliser sur des objets lumineux, que ce soit les planètes ou les étoiles par exemple.

Par ailleurs, on évoque souvent la notion de turbulence atmosphérique : elles sont les mêmes en ciel urbain ou à la campagne. Exception faite peut-être en hiver où la chaleur urbaine crée régulièrement des turbulences spécifiques à la ville.

Observer en ville avec un télescope

Cette turbulence atmosphérique est caractérisée par ce qu’on appelle un pouvoir séparateur. Chaque télescope possède un pouvoir séparateur théorique (un pouvoir de résolution) qui se calcule avec la formule : 120 / diamètre du télescope en mm (calcul indicatif, non précis).

Exemples :

  • Un télescope de 70 mm de diamètre aura 120/70 = 1,7 pouce de pouvoir de résolution
  • Un télescope de 126 mm de diamètre aura 120/126 = 0,95 pouce de pouvoir de résolution
  • Un télescope de 300 mm de diamètre aura 120/300 = 0,4 pouce de pouvoir de résolution

Ainsi, si le pouvoir séparateur de l’atmosphère est de 0,5 pouce et que mon télescope a un pouvoir de résolution de 1,7 pouce : je pourrai utiliser mon télescope à sa pleine mesure. Inversement, avec cette même atmosphère au pouvoir séparateur de 0,5 pouce et un télescope de 0,4 pouce de pouvoir séparateur, les performances de mon télescope seront bridées.

C’est pour cette raison que l’on peut souvent lire que les lunettes astronomiques sont recommandées en ville : car elles possèdent un pouvoir séparateur élevé et pourraient donc, théoriquement, être systématiquement utilisées à leur pleine mesure. Mais cette pleine mesure sera toujours inférieure à un bon télescope, même bridé !

S’il y a des turbulences et que vous avez un télescope à gros diamètre (supérieur au pouvoir séparateur de l’atmosphère), alors il vous suffit de réduire le grossissement de votre appareil, le temps de la soirée ! Qui peut le plus, peut le moins. Mais l’inverse est loin d’être vrai et avec une petite lunette, vous ne captez que très peu de lumière, vous fermant ainsi beaucoup de portes.

Que peut-on observer depuis les villes ?

On peut observer une grande quantité d’objets depuis les villes. Le planétaire vient en premier lieu à l’esprit et il est vrai que plus on se projette dans le ciel profond, plus les observations pourront devenir compliquées. Les contraintes de pollution lumineuse vont brider les performances de votre télescope mais les observations n’en restent néanmoins pas impossibles.

Exception faites pour les observations à faible grossissement, comme par exemple les nébuleuses étendues qui seront compliquées voire impossibles à observer sans un ciel sombre. Ce sont d’ailleurs des objets pour lesquels on cherche souvent à se déplacer – peu importe où l’on habite – pour avoir un ciel optimal.

Inversement, les objets lumineux nécessitant un fort grossissement seront à favoriser : c’est par exemple le cas du planétaire ou encore des amas d’étoiles.

Exemple avec des télescopes de 150 à 250 mm
Grossissement 200-300 fois (planètes)Grossissement 100 fois (amas d'étoile et nébuleuses planétaires)Grossissement 30-50 fois (galaxies et nébuleuses étendues)
En villePossiblePossible avec une qualité altérée et de manière plus limitéeImpossible ou image très polluée
En campagnePossiblePossiblePossible

Les télescopes vers lesquels s’orienter

Le fait d’habiter en ville va brider les performances de votre télescope. Ainsi, on cherchera, dans la mesure du possible, à se déplacer le plus possible pour profiter de ciels moins pollués. Ainsi, le poids et la transportabilité de l’appareil deviennent des critères majeurs dans le choix de votre appareil.

Outre le transport, il faut prendre en compte l’espace dont vous disposez. Où êtes-vous amenés à disposer votre télescope ? Sur un balcon ? Dans votre salon ? Un grand télescope peut vite devenir imposant et volumineux. La taille de l’appareil constitue ainsi un deuxième critère potentiellement majeur.

Pour ces deux raisons, les télescopes Maksutov sont généralement de bons choix pour la ville : très compacts, ils peuvent atteindre de longues focales tout en restant légers et non imposants. Ils sont par ailleurs particulièrement recommandés pour le planétaire, qui constitue une cible prioritaire en ville.

Mention spéciale également pour les télescopes Dobson qui sont bien plus imposants que les Maksutov mais qui ont l’avantage de ne pas utiliser de montures externes et prennent donc, au final, moins de place sur un balcon par exemple. Il faut toutefois souligner que ce sont parfois des appareils compliqués à transporter, surtout lorsque l’on s’oriente vers du milieu de gamme (on atteint vite les 20 kg !). Les plus petits Dobson seront par ailleurs très faciles à ranger dans une armoire ou un placard après chaque utilisation.

Les lunettes astronomiques ont la réputation d’être particulièrement adaptées pour la ville, pour des raisons parfois erronées comme décrit ci-dessus, mais aussi pour des raisons plus justes comme le fait de pouvoir s’adapter à la température extérieure plus rapidement qu’un télescope (deux fois plus vite environ). Toujours est-il que les lunettes, à même grossissement qu’un télescope, auront le désavantage de générer du chromatisme et donc de sous-performer. De manière générale, nous ne recommandons pas l’achat de lunettes astronomiques en ville, qui plus est à faible budget. Les télescopes seront quasi systématiquement de meilleurs choix.

Un autre élément qui vaut la peine d’être pointé du doigt est le diamètre du télescope. Contrairement à certaines idées reçues, le diamètre n’a pas d’influence sur les turbulences atmosphériques : vous serez affecté par ces dernières quoi qu’il arrive.

Prendre un diamètre trop important en ville, c’est risquer le fait de ne pas pouvoir exploiter la pleine mesure de votre télescope très régulièrement. Le risque étant ici d’investir sur un bel appareil pour en final n’utiliser qu’une partie de ses possibilités. Ainsi, dans l’optique où vous ne transportez pas votre appareil et qu’il restera systématiquement en ville, dans votre salon ou dans votre balcon, s’orienter vers des trop gros diamètres n’aura pas un grand intérêt.

Choix 1Choix 2Choix 3
TélescopeTélescope Dobson Skywatcher N 130/650 Heritage FlexTube DOBTélescope Omegon N 150/750 EQ-3Télescope Maksutov Skywatcher MC 102/1300 SkyMax EQ-2
FabricantSkywatcherOmegonSkywatcher
ImageDobson Skywatcher 130/650Omegon 150/750Maksutov 102/1300
Type d'appareilNewtonNewtonMaksutov
Diamètre130 mm150 mm102 mm
Focale650 mm750 mm1300 mm
Grossissement maximum260 fois300 fois200 fois
Poids du tube6,2 kg12,9 kg15,1 kg
MontureDobsonEquatoriale EQ3Equatoriale EQ2
OculairesDeux oculaires fournis : 25 mm et 10 mmDeux oculaires fournis : 25 mm et 6,5 mmDeux oculaires fournis : 25 mm et 10 mm
Observations possiblesPlanétaire principalement, mais aussi les premiers élements du ciel profond sur un ciel sombre (en campagne plutôt)Planétaire principalement, mais aussi de nombreux objets du ciel profond sur un ciel sombre (en campagne plutôt ou alors les astres principaux en ville)
Planétaire principalement, mais aussi les premiers élements du ciel profond sur un ciel sombre (en campagne plutôt)
Cible prioritairePlutôt débutants, mais initiés égalementDébutants et initiésDébutants et initiés
CommentairesLes Dobson sont par définition d'excellents premiers achats (notamment) en raison de leur excellent rapport qualité / prix et de leur facilité de manipulation. Outre ces 2 éléments, depuis votre balcon en ville, vous n'aurez aucun problème pour observer en détail les grosses planètes : que ce soit les anneaux de Saturne ou les satellites galiléens de Jupiter. Pour le ciel profond, les premiers éléments seront visibles mais on préférera emporter le télescope dans un ciel plus sombre pour s'éloigner de la pollution lumineuse !Un excellent choix, très polyvalent, que ce soit pour la ville ou la campagne. Investissez en complément dans un oculaire de 2,5 mm (ou 3 mm pour plus de polyvalence) pour profiter d'un grossissement de 300 (qui peut être réservé à des soirs sans trop de turbulences) qui sera à coup sûr époustouflant. Avec l'Omegon 150/750, vous ne vous fermez par ailleurs aucune porte et notamment dans le ciel profond. Certes en ville, comme décrit ici il sera compliqué de voir une multitude d'objets mais si vous n'aurez aucun problème à le transporter pour profiter de ciel plus sombres éventuellement. En ville pour du planétaire et à la campagne pour le ciel profond donc !Les Maksutov sont des télescopes très compacts et donc souvent appréciés pour une utilisation urbaine. Ils sont certes un peu lourds mais rien d'insurmontable pour les transporter. La qualité d'image des Maksutov est vraiment très bonne : l'observation planétaire sera à coup sûr source d'émerveillement. On peut souligner un des inconvénients des Maksutov qui est leur mise en température assez longue : il faut parfois attendre jusqu'à 1h les soirs d'hiver pour que l'image trouve une bonne résolution.
Prix recommandé229 euros329 euros394 euros
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Faut-il diaphragmer son télescope ?

Diaphragmer son télescope, ça signifie réduire son ouverture en plaçant un couvercle avec un trou à l’intérieur. En fonction de la taille du trou dans le couvercle, on diminue le diamètre de son appareil.

On cherche généralement à diaphragmer son télescope lorsque les turbulences atmosphériques sont trop importantes, pour gagner en stabilité au niveau de l’image. Cela peut également aider pour effectuer des collimations sur les télescopes à grande ouverture. Aussi, pour de l’observation lunaire ou solaire, très lumineuse, cela peut permettre de limiter la lumière captée et de gagner en confort au niveau des yeux.

Dans le cadre d’une lunette astronomique, diaphragmer cette dernière peut également permettre de réduire le chromatisme sur les planètes.

Cela étant dit, faut-il diaphragmer son télescope en ville ?

Non. La pollution lumineuse va brider les performances du télescope comme décrit ci-dessus. Diaphragmer son télescope, c’est le brider davantage.. !

Le seul intérêt de diaphragmer éventuellement votre appareil concerne les télescopes à grands diamètres comme décrit ci-dessus (300 mm ou plus, voire moins en fonction de votre sensibilité) et uniquement pour les observations de la Lune et du Soleil, qui peuvent alors être très lumineuses, voire trop pour la majorité des yeux !

Utiliser des filtres en ciel urbain

Il existe plusieurs typologies de filtres pour les télescopes et notamment des filtres anti pollution lumineuse.

L’apport de ces derniers est contesté et on trouvera des témoignages contraires, et en masse, sur ce sujet spécifique. Le mieux est souvent de rechercher des témoignages sur un filtre spécifique avant de l’acquérir, car ces derniers ont un coût non négligeable (à partir d’une 50aine d’euros jusqu’à plus cher).

Il faut également noter que ces filtres ne vont pas transformer votre télescope : si lorsque vous cherchez à observer une nébuleuse planétaire, vous ne voyez qu’une tâche floue lointaine, l’ajout du filtre améliorera le contraste mais vous ne verrez toujours qu’une tâche floue lointaine.

S’il fallait chiffrer cette amélioration de contraste, comptez entre 8 et 10% d’amélioration. A réserver éventuellement pour de l’astrophoto mais pour du visuel, l’apport sera anecdotique. Ne vous attendez donc pas à des miracles !

En ce qui concerne les autres typologies de filtres, si vous avez un petit télescope, vous n’y trouverez aucun intérêt. Avec un télescope à plus grand diamètre en milieu urbain, les filtres les plus intéressants seront probablement ceux prévus pour les nébuleuses planétaires.

Pour les nébuleuses étendues, comme décrit ci-dessus, elles seront inaccessibles depuis la ville !

Ces filtres se décomposent en deux catégories :

  1. Les filtres UHC : utilisé pour la grande majorité des nébuleuses
  2. Les filtres OIII (3 “i”) pour les autres

Ces filtres ont l’avantage de considérablement améliorer la visibilité des nébuleuses et notamment de faire ressortir les émissions de gaz qui les entourent rendant les observations bien plus spectaculaires.

Omegon Filtre OIII 1.25"
Omegon Filtre OIII
Filtre à utiliser pour visualiser plus en détails les nébuleuses. Il est particulièrement conseillé dans le cadre de la pollution lumineuse (mais pas que).
En plus de filtrer efficacement la pollution lumineuse, avec ce filtre, les nuages d'Orion ne seront plus un mythe, à l'instar de dizaines d'autres nébuleuses. Attention à bien le réserver aux nébuleuses (ça vaut le détour) et à ne pas les utiliser en planétaire ou pour cibler des étoiles, ce qui reviendrait alors à dégrader vos observations !
79 euros
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Questions / réponses

  1. Vaut-il réellement la peine d’observer en ville avec un télescope ?

    Oui ! Contrairement à certaines idées reçues, il est tout à fait possible de faire de belles observations en ville. Mais la ville est une contrainte qu’il ne faut pas obstruer : la pollution lumineuse ferme de grandes portes et notamment dans le ciel profond. Pour le planétaire et pour les objets lumineux du ciel profond, ils restent toutefois très accessibles. Attention, la pollution lumineuse vient souvent brider les performances des télescopes et au final un très bon télescope dans un ciel urbain équivaut à un télescope moins bon dans un ciel sombre.

  2. Peut-on déplacer un télescope lorsque l’on habite en ville ?

    Oui ! C’est même très recommandé. Vous pouvez tout à fait observer depuis votre fenêtre ou balcon la semaine, puis profiter du week-end pour vous éloigner de la ville et de sa pollution lumineuse afin de profiter d’un ciel sombre. Vous prendrez ainsi la pleine mesure des possibilités offertes par votre télescope et pourrez bien plus aisément vous plonger dans le ciel profond.

  3. Quels sont les critères pour choisir un télescope en ville ?

    Les critères restent les mêmes que pour un télescope normal sauf que l’on y ajoute deux contraintes notables : la première étant de favoriser les télescopes compacts et légers afin de facilement les déplacer si nécessaire, et la deuxième étant de se diriger vers des télescopes peut-être plus adaptés au planétaire puisqu’on sait que le ciel profond est difficilement accessible depuis un ciel urbain.